Fiscalité et intelligence artificielle en Suisse : vers un nouveau modèle fiscal aux robots intelligents ?
L’essor de l’intelligence artificielle (IA) et des robots dits « intelligents » bouleverse les repères traditionnels du droit fiscal suisse. Fondé sur l’imposition des personnes physiques et morales, notre système fiscal se trouve confronté à la montée en puissance de systèmes technologiques capables de remplacer l’activité humaine.
Un contexte suisse en mutation
En tant qu’économie de services et d’innovation, la Suisse est directement exposée à la transformation numérique. L’intégration de l’IA dans l’administration publique et les entreprises implique une redéfinition des concepts de travail, de revenu et de capacité contributive. Cela soulève des enjeux majeurs : érosion des recettes fiscales sur le revenu des personnes physiques, augmentation potentielle du chômage technologique, pression accrue sur les assurances sociales.
Vers une nouvelle catégorie de contribuables ?
Actuellement, seules les personnes physiques et morales sont soumises à l’impôt. La question d’un statut fiscal propre aux entités robotiques est posée : peut-on envisager une imposition des systèmes autonomes qui génèrent des ressources économiques ? Sans leur reconnaître une personnalité juridique, un critère fondé sur la capacité économique — central en droit fiscal suisse — pourrait justifier une obligation fiscale spécifique.
Des pistes d’imposition ciblée
Inspirée de débats internationaux (UE, Corée du Sud), une fiscalité des robots pourrait prendre plusieurs formes :
➤ Taxe d’équipement ou d’usage, fondée sur la valeur ou la fréquence d’utilisation des robots (à l’image de la fiscalité automobile).
➤ Surtaxe sur l’automatisation, liée au ratio entre revenus générés et emplois humains.
➤ Taxe sur la propriété ou les revenus de l’IA, assimilable à une redevance ou un impôt anticipé.
➤ Soutien fiscal à l’emploi humain, par des déductions ou crédits d’impôt.
➤ Financement d’un revenu minimum de base, en cas d’automatisation massive.
Conclusion
La Suisse, forte de sa tradition d’innovation et de stabilité, est bien placée pour piloter une réforme fiscale adaptée à l’économie numérique. Celle-ci devra conjuguer neutralité technologique, équité fiscale et préservation de l’attractivité. Loin d’être un exercice théorique, l’adaptation du droit fiscal suisse à l’ère de l’IA devient un impératif juridique, économique et social.
Article rédigé par Me Lassana Dioum